Avril 2024 - n°9

édito

La vie devant soi

Pr Alain Leon,
directeur du site d’appui champardennais de l’EREGE

La santé est-il le bien le plus important pour les hommes ?

« Est-il un bien plus important pour les hommes que la santé ? » Dans Gorgias, Socrate parle d’un médecin qui prétendrait qu’il n’y a pas de plus grand bien pour les hommes que la santé, avec la beauté et la richesse, « ce qui procure aux hommes la liberté… ». « La santé, un état de complet bien-être physique, mental et social, qui ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité, un des droits fondamentaux de tout être humain » comme l’a défini l’Organisation Mondiale de la Santé en 1946 et qui fait en 1986 dans la charte d’Ottawa la promotion de la santé, charte qui a pour but de donner aux individus davantage de maîtrise de leur propre santé et davantage de moyens pour l’améliorer. Celle-ci met en avant des « conditions préalables à la santé : se loger, accéder à l’éducation, se nourrir convenablement, disposer d’un certain revenu, bénéficier d’un écosystème stable, compter sur un apport durable de ressources et avoir droit à la justice sociale et à un traitement équitable », des conditions pour l’existant, d’exister au sens lévinassien, pour bien se porter.

Des préalables atteints plus ou moins difficilement pour tous dans les pays occidentaux, qui donnent à « l’existant qui s’occupe de soi » l’occasion de « se mettre en rapport avec son exister » perdant ainsi une partie de sa liberté parce qu’un « un être libre n’est déjà plus libre parce qu’il est responsable de lui-même ». Dans ces conditions, le principe de rationalité auquel il obéit en première intention lui recommande de faire ce qu’il pense, après avoir tout bien considéré, être le meilleur pour lui. Mais dans le domaine de sa propre santé il y a le soi qui nie la nécessité, en particulier lorsqu’il est bien portant, de se soi-nier et le soi qui lui demande de se soigner. Exister implique de se projeter dans l’avenir, de donner la priorité au futur et de choisir, choisir la vie devant soi.

A l’instant, personne ne peut répondre à la question « de quoi demain sera fait ? ». « le présent est le départ de soi, il a un passé sous la forme de souvenir, le présent a une histoire mais il n’est pas l’histoire, il commence ». Si la notion de santé est inséparable de celle de prévoyance, malgré tout, il peut être rationnel de se préoccuper davantage de son présent, « bien se porter » plutôt que d’imaginer son futur « rester en bonne santé ». Etre en bonne santé ou être bien portant, en dépit du temps qui passe, de la maladie qui change le rapport à l’existence, peut être un choix. Le choix de « la vie devant soi » qui consiste à accepter de vivre dans l’incertitude et pourtant de continuer à construire son projet, son projet d’exister.

Exister par référence à "La vie devant soi" de Romain Gary raconté à la première personne, « je » comme mode d’exister, centré sur la manière dont les individus se créent une identité et « la nécessité de s’occuper de soi » lorsqu'ils sont confrontés à des situations de marginalité et de souffrance qui invite à réfléchir sur la notion de dignité humaine centrée sur le droit de chaque individu à décider de son propre destin.

Définition

Explication d'un thème lié au questionnement éthique

Amandine Andruchiw, coordinatrice du site d'appui champardennais

La médecine narrative.
Mme Isabelle Galichon, docteure en littérature francophone. Spécialiste du récit de soi et co-fondatrice de la chaire Médecine narrative du CHU et de l’Université de Bordeaux.

Interview : Laure Pesch, coordinatrice du site d’appui alsacien de l’EREGE.

presse

Les articles scientifiques ou grand public qui posent des questions éthiques

Dr Patrick Karcher, directeur de l'EREGE et Pr Gérard Audibert, directeur du site d’appui lorrain de l’EREGE

Faut-il définir un stade terminal de l’anorexie mentale ?

Dr Patrick Karcher,
directeur de l'EREGE

La question de la définition d’un stade terminal de l’anorexie mentale ouvrirait un débat dans deux directions : la possibilité d’un accès facilité aux soins palliatifs, et celle d’un droit à l’aide active à mourir dans les pays où elle est légalisée.

Dans les pays ayant légalisé une aide active à mourir (AAM), en cas d’affection incurable engageant à court ou à moyen terme le pronostic vital, des débats émergent visant à étendre les indications de l’AAM, notamment à des affections incurables mais n’engageant pas nécessairement ou systématiquement le pronostic vital.
C’est un tel débat qu’a déclenché aux USA, la publication d’un article dans le Journal Of Eating Desorders conduisant à des réactions tant scientifiques que populaires avec récemment une publication à la une du Washington Post.
Dans cet article, les auteurs se proposaient de définir le stade terminal de l’anorexie mentale, dont la plupart des personnes atteintes se rétabliront mais dont une petite minorité, après des années de traitements restant inefficaces et devenant parfois nocifs décèderont, le plus souvent de malnutrition. Gaudiani et ses collègues, se fondant sur trois cas cliniques (dont un concernant l’une des co-autrices de l’article) et une revue de la littérature, essaient de construire des critères qui permettraient de définir un stade terminal de l’anorexie mentale. L’enjeu est, pour les auteurs, de permettre une meilleure prise en soins de ces patients, notamment par un accès facilité aux soins palliatifs, mais également la possibilité d’un droit à l’aide active à mourir dans les pays où elle est légalisée.
Il n’existe pas, à ce jour, de critères permettant aux patients et aux cliniciens de distinguer les présentations légères et susceptibles de guérir de la maladie des stades irréversibles, préterminaux et terminaux. Pourtant l’anorexie mentale a un taux de mortalité élevé estimé à 5 à 16 fois celui de la population générale, l’âge moyen de décès étant de 41,3 ans. Les cas cliniques sont ceux d’un homme et deux femmes de 33 à 36 ans, ayant une histoire longue et chaotique de leur pathologie, émaillée de traitements hospitaliers et ambulatoires, de gavages, parfois sous contrainte juridique avec échecs et récidives. Les trois patients décident à un moment de ne plus poursuivre les traitements, qu’ils jugent inutiles et restreignent encore voire arrêtent les apports alimentaires. Ils sont tous admis en soins palliatifs et deux décèdent par AAM.
Les auteurs proposent 4 critères d’anorexie mentale au stade terminal : 1. Avoir un diagnostic d’anorexie mentale 2. Être âgé de 30 ans ou plus 3. Avoir accepté de façon prolongée des soins multidisciplinaires de haute qualité pour les troubles de l’alimentation 4. Exprimer clairement le désir d’arrêter les traitements en acceptant que la mort en sera l’issue et posséder la capacité de prendre des décisions. La personne doit exprimer qu’elle ne peut plus vivre avec sa maladie et qu’elle ne maintiendra plus l’apport nutritionnel minimum nécessaire pour soutenir la vie.
En proposant ces critères, les auteurs espèrent aider les soignants à mieux évaluer l’état de ces patients et à leur fournir des soins appropriés. Selon eux, ces patients méritent les mêmes soins et les mêmes droits que tous les autres patients atteints d’une maladie en phase terminale, y compris l’aide médicale à mourir dans les juridictions où de tels soins sont légaux.
Dans la même revue, Guarda et ses collègues expriment leur crainte qu’une telle définition ne conduise à des décès injustifiés pour une maladie traitable. Pour eux, même les cliniciens chevronnés ne peuvent ni prédire quel patient se rétablira ni quand, ni identifier ceux qui ne seront pas en mesure de survivre. Selon l’article, la plupart des personnes de plus de 30 ans souffrant toujours d’anorexie mentale malgré des soins adaptés ne mourront pas dans les six mois. Les auteurs rajoutent qu’un traitement sous contrainte juridique en milieu hospitalier spécialisé peut sauver des vies, même à un stade avancé et, lorsqu’il est efficace, est souvent accueilli avec gratitude par les patients qui n’en voulaient pas initialement.
Mais l’argument central avancé contre la définition d’un stade terminal est l’ambivalence des patients, ambivalence qui est une des caractéristiques de cette maladie et entraîne l’évitement du traitement. Ils remettent donc en cause la capacité des malades anorexiques à décider librement de l’arrêt des traitements et de la prise alimentaire, un des critères du stade terminal défini par Gaudiani. La reconnaissance d’un stade terminal, qui ne manquerait d’être popularisé par les réseaux sociaux risque ainsi, d’après Guarda, de renforcer le « raisonnement anorexique » selon lequel l’amélioration de la qualité de vie et le potentiel de guérison sont des perspectives sans espoir.
Ces articles nous incitent à réfléchir l’incertitude qui accompagne toute pratique médicale, notamment, concernant la détermination du moment de la fin de vie. Cette incertitude varie certes selon la pathologie mais est consubstantielle du soin. Elle doit nous inciter à l’humilité mais surtout à ne pas faire dépendre la mise en œuvre de soins palliatifs à la détermination d’un seuil ou à l’accès à une phase de la maladie. Lorsque des symptômes pénibles persistent, ils requièrent un avis spécialisé palliatif quel que soit le stade de la maladie. C’est ce que rappelle également le récent rapport Chauvin en proposant la mise en œuvre précoce de soins d’accompagnement.
Ils pointent aussi la difficulté de la prise en compte de l’avis du patient dans certaines pathologies notamment mentales. Certes, arrêter ou ne pas débuter un traitement est un droit de tout patient même s’il n’est pas en phase terminale de sa maladie et même si cette décision peut compromettre sa survie. Mais qu’est-il de ce droit dans une pathologie dans laquelle le traitement par gavage se fait parfois sous contrainte et donc contre l’avis du patient. Jusqu’où peut se poursuivre cette contrainte et à partir de quand l’avis du patient que « trop c’est trop » doit être entendu.
Enfin, ce débat traduit l’extrême difficulté à déterminer pour un patient son pronostic vital à court terme, exigé par la loi actuelle pour la mise en œuvre d’une sédation profonde maintenue jusqu’au décès, et présage la difficulté encore plus grande de connaitre son pronostic vital à moyen terme, si l’AAM était légalisée. Plus que jamais, comme l’écrivait Canguilhelm qu’« on ne soigne qu’en tremblant ».

Pourquoi les médecins quittent l’hôpital ?

Pr Gérard Audibert,
directeur du site d’appui lorrain de l’EREGE

Etude sur les insatisfactions et les déterminants du burnout à partir d’une cohorte de 37 000 médecins américains.

La pandémie COVD a accéléré la fuite des professionnels de santé des structures de soins et en particulier de l’hôpital public. La description précise de ce phénomène et l’élucidation des facteurs qui le provoquent sont essentiels à la définition de politiques permettant la réduction de cette fuite pour améliorer le système de santé.
En décembre 2023, la revue américaine JAMA Network Open a publié un article qui contribue à notre compréhension du problème. Même si les systèmes de santé diffèrent, même si la cible de l’étude se limite aux médecins des centres universitaires, son ampleur fournit des éléments de réflexion intéressants.
Un groupe de 37 000 médecins issus de 15 centres universitaires ont été sollicités pour répondre à un sondage sur leur état actuel de burnout et de satisfaction professionnelle (estimés par l’échelle PFI), leur intention de quitter l’institution dans laquelle ils travaillent dans un délai de deux ans et la relation entre cette intention et des facteurs supposés déterminants de burnout/satisfaction professionnelle. L’étude a été conduite entre octobre 2019 et juillet 2021.

Un total de 18719 médecins (soit 50%) a répondu au sondage (45% hommes, 43% de femmes, 12% sans mention de genre). Parmi eux, 32% ont exprimé une intention de quitter leur établissement dans les deux ans, sans influence du genre mais avec une influence de l’âge, les plus jeunes souhaitant plus souvent partir. Dans ce collectif, 38% réunissaient les critères de burnout, avec une nette prédominance féminine (42% des femmes, 33% des hommes) et une nette prédominance des jeunes. La satisfaction professionnelle est le miroir exact du burnout, avec des hommes et des sujets âgés plus souvent satisfaits. Chaque augmentation de 1 point sur l’échelle de burnout était associée à une augmentation d’intention de départ. Inversement, chaque augmentation de 1 point sur l’échelle de satisfaction professionnelle était associée à une réduction de l’intention de départ.

Parmi les facteurs institutionnels associés au burnout figuraient l’absence de reconnaissance professionnelle, l’organisation des soins pendant la crise COVID, le défaut d’aide des collègues, un défaut d’aide de la hiérarchie et un défaut d’efficacité des logiciels professionnels. Sur un plan plus individuel, étaient mentionnés la dépression et un impact négatif du travail sur la vie personnelle.

Cette photographie de la période COVID montre une proportion élevée de médecins souhaitant quitter leurs fonctions et apporte un éclairage intéressant sur les facteurs favorisants. La principale limite est qu’une intention de partir ne constitue pas un départ réel. Pour autant, cela n’en reste pas moins un indicateur intéressant. Même si cette étude a été réalisée aux Etats-Unis, nombre de résultats s’appliquent probablement à la médecine française. Les données françaises disponibles sont très hétérogènes, donnant des chiffres différents selon les sources. Aucune étude n’a ni la rigueur scientifique ni l’ampleur de celle menée aux USA. En recoupant différentes sources (DGOS, FHF, …), la proportion de fuite sur la même période se situait autour de 10%. Cependant, ces départs survenaient dans un système de santé déjà très en tension où les équipes étaient réduites à leur minimum dans un objectif de rationalisation outrancière des dépenses de santé. La prise en compte des différents facteurs menant au burnout et à l’insatisfaction professionnelle nécessitera une politique active favorisant le bien être des professionnels, faute de quoi la fuite perdurera.

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Des liens vers des émissions TV, radios, podcast, webinaires, conférences... intéressants du point de vue éthique

Laure Pesch, coordinatrice du site d'appui alsacien

Podcast

Les mots dans le soin pouvoir dire, pouvoir raconter et se raconter

Cynthia Fleury, s’appuie sur la pensée de Paul Ricoeur, pour définir l’autonomie comme étant la possibilité de l’attestation de soi et la vulnérabilité comme étant la difficulté à attester de soi. L’autonomie se définit ainsi comme pouvoir de rassembler sa propre vie dans un récit intelligible et racontable, pouvoir de se raconter comme agent de son histoire. Alors les mots participent au soin quand ils racontent l’expérience individuelle dans la relation patient –vulnérable- et soignant, et participent du soin, quand ils racontent l’expérience et conforte l’autonomie. C’est pourquoi en complément de la définition de la médecine narrative nous proposons un Podcast sur la biographie hospitalière et un autre sur la bibliothérapie.

La biographie hospitalière
La bibliothérapie
Productions du parcours « bibliothérapie »

culture

Tour d’horizon d’œuvres qui nous permettent d’aborder des questionnements éthiques de manière singulière

Laure Pesch, coordinatrice du site d'appui alsacien

Sélection des livres de l'édition n° 9
Lecture BD

La guerre des tétons (trois tomes)

Lili Sohn Ed. Neuilly sur seine, Michel Lafon 2015-2015-2016

« J’ai également passé une scintigraphie. Mais c’est quoi, ça ? Une radiographie + une solution radioactive injectée. Histoire de vérifier si Günther n’a pas laissé son linge sale sur mes os ! Tout va bien, il n’y a aucune vieille chaussette qui traîne. »

Lili Sohn a 29 ans quand elle rencontre Günther. Günther, c’est son cancer. Au travers de dessins simples et colorés, Lili Sohn nous entraîne dans un combat, en leggings tous plus improbables les uns que les autres, contre sa maladie. Invasion, extermination, mutation : voilà le programme de cette véritable « guerre des tétons ».
Lili Sohn aborde certes un sujet difficile, le cancer du sein, mais elle arrive à le rendre accessible grâce à des explications techniques claires et toujours à propos, qu’elle formule avec beaucoup d’humour et d’authenticité. La justesse des émotions est remarquable : ici, pas de fausses pudeurs ! Le récit de ses aventures est égrené au rythme des chimiothérapies, des repousses de cheveux et autres poils, des reconstructions mammaires, et produit des échos à la fois drôles et douloureux. Car s’il est vrai que chaque parcours est unique, cette BD n’en a pas moins su capter les universaux au cœur des anecdotes personnelles, et rendre ainsi possible le partage, voire parfois la convergence de moments et d’expériences communes auxquelles les personnes à qui on annonce une maladie grave, potentiellement mortelle, sont confrontées dans leur chemin de vie et leur parcours de soin.
Les descriptions des relations sont nécessairement cocasses, touchantes, mais aussi sans concession, qu’il s’agisse des rapports avec les proches, comme Didier le compagnon félin, Martin le compagnon humain ou les parents, avec les multiples professionnels de santé, mais également des liens que l’on tisse malgré nous avec les espaces temps que l’on traverse, les sols que l’on foule, les plafonds que l’on regarde, les machines et les surfaces avec lesquelles on rentre en contact. Lili Sohn nous invite, en nous racontant les différentes techniques de reconstruction et en déjouant les préjugés sexistes, à aller par-delà les cicatrices extérieures pour mieux voir celles de l’intérieur, et à explorer nos rapports modifiés à notre corps, à la féminité, avec force et fragilité, humour et gravité. Plus qu’une guerre des tétons, il s’agit d’un récit émancipateur, encapacitant, une histoire de paix avec soi-même malgré tout.

Recension : Amandine Andruchiw, coordinatrice du site d'appui champardennais

Lecture Essai

Abolir la contention

Mathieu Bellahsen , Ed. Libertalia, 2023

Mathieu Bellahsen écrit là un pamphlet contre les pratiques de contention et d’isolement en milieu psychiatrique. Ces pratiques entravant la liberté d’aller et venir, liberté fondamentale en droit français et international, sont pourtant permises en psychiatrie de façon dérogatoire dans le droit français, depuis 2020. Mais comme le rappelle l’auteur « encadrer une mesure indigne sans remettre en cause « l’indignité » ne la rend pas légitime. Ces pratiques sont, par contre, toujours réalisées en dehors de tout cadre légal (et donc illégales) partout ailleurs dans le domaine médical et médico-social.
Le texte est illustré par de multiples situations de dérives des pratiques (documentaire au sein d’une unité de l’hôpital Ste Anne à Paris, bizutage par contention à Moisselles, utilisation abusive du cadre légal de l’isolement psychiatrique lors la pandémie Covid…) mais aussi de situations cliniques exemplaires.
Mathieu Bellahsen rappelle que la contention n’est pas un soin ; elle peut ouvrir à un processus thérapeutique mais n’en est pas un. Elle s’inscrit plus largement dans une vision du soin psychiatrique que l’auteur définit comme un système contentionnaire et une culture de l’entrave ; cette culture persiste à véhiculer l’image du fou dangereux, dans un contexte sociétal lui aussi marqué par une dérive sécuritaire. Réfléchir l’utilisation de la contention ne peut passer que par une réflexion plus large du soin psychiatrique, sociétale et politique. Même si la littérature sur la contention et l’isolement reste pauvre, il existe de multiples expériences de diminution voire d’interdiction des contentions (comme en Islande). L’auteur en décrit quelques-unes en France (où 15% des unités psychiatriques n’utilisent pas de contentions) et dans le monde.
Le livre s’achève par une liste de propositions en vue de l’abolition de la contention (observatoire international sur l’usage de la contention et ses conséquences, recherches sur les expériences de réduction des entraves, débats nationaux et internationaux, réflexion sur le soin psychiatrique incluant les usagers…)

Recension : Dr Patrick Karcher, directeur de l'EREGE

Film

Perfects days

Wim Wenders, 2023

Le film se passe à Tokyo à Shibuya avec un seul rôle principal Hirayama tenu par l’acteur Koji Yakusho. On y découvre des toilettes publiques plus belles les unes que les autres où l’acteur officie chaque jour en les nettoyant de fond en comble.
Wim Wenders dans une interview le décrit ainsi : » J’ai imaginé un homme qui avait un passé privilégié et riche et qui avait sombré profondément.et qui a eu une révélation un jour, alors que sa vie était au plus bas, en regardant le reflet des feuilles créées par le soleil qui éclairait miraculeusement l’enfer dans lequel il se réveillait… »
La routine de cet homme est la colonne vertébrale du scenario où l’on perçoit, écrit Wim Wenders, que la beauté, dans le rythme régulier des journées qui se ressemblent, émerge paradoxalement quand on commence à en percevoir les variations. Il s’agit d’apprendre à vivre entièrement ici et maintenant., et Hirayama vit avec la musique, les livres et les arbres. Il n’y a plus de routine, il n’y a qu’une chaine sans fin d’évènements uniques, de rencontres uniques et de moments uniques.
Le film est dédié au réalisateur japonais OZU. Wim Wenders a été influencé, dit-il, par le sentiment que ce qui imprègne les films d’OZU est que chaque chose est unique, chaque moment ne se produit qu’une seule fois et les histoires quotidiennes sont les seules histoires éternelles.

Présentation par : Yves Alembik, président du Conseil d’orientation du site alsacien de l’EREGE