Juillet 2021 - N°1

édito

Alain Leon

Au commencement, il y a l’étonnement. Avec la création d’échos éthiques, l’Espace de Réflexion Ethique du Grand Est (EREGE) se donne l’ambition d’accompagner ce processus intellectuel qui appelle la question.

Le mot étonnement tire son origine du latin attonare qui signifie littéralement “frapper par la foudre”. D’abord employé pour désigner quelqu’un d’“étourdi par un coup violent” ou “frappé de stupeur” ce mot renvoie à un état psychologique d’“épouvante” ou d’“effroi”. C’est ce qui nous est arrivé lorsque tous les soirs, depuis le printemps 2020, la liste des victimes de la Covid 19 s’est allongée. A la différence de la surprise, surprise qui renvoie essentiellement à une émotion éprouvée par un sujet passif et subissant, l’étonnement désigne un processus de dérangement qui nous amène à prendre conscience de l‘étrangéification de l’ordinaire”. Pour Kant dans Critique de la faculté de juger, « L’étonnement est un choc de l’esprit qui procède de l’incompatibilité d’une représentation, ainsi que de la règle qu’elle donne, avec les principes qui se trouvent déjà dans l’esprit comme fondements ; et celui-ci suscite un doute : a-t-on bien vu ? A-t-on bien jugé ? ». L’étonnement dérange dans nos certitudes, met à mal nos conceptions et bouscule nos représentations habitudinaires. Il est l’initiateur de l’activité réflexive. Il nous amène à éprouver les limites de nos connaissances et dans le meilleur des cas est susceptible de nous engager dans une démarche d’acquisition de nouveaux savoirs. Selon Aristote, c’est toujours à travers un étonnement que la pensée se met en marche et qu’elle nous ouvre de nouveaux horizons. L’étonnement nous impose de rompre avec les coutumes, avec l’immobilisme, avec les certitudes et les allants de soi et nous oblige à considérer les pré-requis comme étranges, douteux et donc questionnables. C’est une démarche de prise de recul, de remise en question du monde qui nous entoure et qui soudainement nous fait prendre conscience que ce que nous tenions habituellement pour vrai ou acquis ne fonctionne plus et ainsi nous libère de nos croyances et préjugés. Manifester son étonnement, c’est marquer un écart avec le sens commun et se mettre en mouvement pour le questionnement.

Avec Echo, une nymphe de la mythologie grecque élevée et instruite par les muses, condamnée à répéter tout ce qu’elle entend, l’EREGE souhaite porter à la réflexion tous les maux et tous les mots qui content notre société. Et cette dernière année n’a pas manquée d’occasions de s’étonner : la mondialisation brutale d’une épidémie localisée à l’origine sur un marché chinois obligeant les pays à fermer leurs frontières et leurs citoyens à s’éloigner les uns des autres, l’agressivité de la maladie Covid-19 dépassant les moyens hospitaliers planétaires exposant au choix des individus à traiter, la mortalité explosive, naturelle, arbitraire et incontrôlable, des personnes les plus vulnérables interdites de départ au risque de devenir des fantômes, l’éviction du visage de l’autre neutralisant sa responsabilité et la mienne, l’enfermement de nos aïeux pour ne plus les revoir, le mirage du solutionnisme technologique avec la mise en place d’une panoplie du parfait homme tracé, la mise à disposition de l’occident avant tous du vaccin, certes ordonnée, mais laissée au libre arbitre…

Toutes expériences émotionnelles qui remettent en question nos repères et suscitent anxiété et angoisse. Elles nous fournissent la matière à l’activité de penser. Pour les soignants, cette angoisse, sur un plan subjectif, « est suscitée par un matériau qui menace la vulnérabilité fondamentale de tout être humain et elle ravive des angoisses singulières et personnelles en rapport avec des expériences passées. Elle menace aussi de saper leurs défenses et leurs sublimations principales ». La capacité de penser est une bonne manière de faire face et de mettre en forme une expérience émotionnelle difficile. La recherche d’une réponse de l’ordre de l’éthique représente secondairement pour eux l’élaboration d’une attitude apaisée passant par le partage et la parole.

Hera, épouse de Zeus, disait à Echo « peut-être Echo que tu as le dernier mot, mais tu n’auras jamais le premier ! ». Echos Ethiques veut répéter ce qui étonne, même s’il n’a pas le premier mot. Après réflexion il ne veut pas non plus du dernier mot.

Témoignages

Récits autour d’un thème lié au questionnement éthique.

Amandine Andruchiw, coordinatrice du site d’appui champardennais.

Autodétermination

Favoriser l’Autodétermination en établissement médico-social

Michèle LATU et Aurélie LE BARS,
Directrices ESMS| Association d’Aide aux IMC du Nord et de l’Est

Être acteur, participer, faire des choix, décider, faire valoir ses droits…

Sur le papier, ça a l’air bien mais pour les personnes en situation de handicap, ce n’est pas si simple.
Leur vécu du handicap avec son lot de difficultés et d’« incapacités » renvoyées par la société dans son ensemble nourrit, pour beaucoup d’entre elles, un sentiment d’incapacité : incapacité à avoir un appartement, incapacité à avoir une vie de couple et une vie de famille, incapacité à suivre une formation, ...

Au fil des épreuves et des discours peu encourageants, beaucoup se résignent à laisser les « autres » - leurs parents, leurs frères et sœurs, les professionnels les accompagnant - penser et mettre en musique ce qui serait a priori bon pour elles.

Ce processus de construction est alimenté par une institution qui, avec toute sa bienveillance, a mis en place, au fil des lois, un système de (sur)protection des personnes qu’elle accompagne, laissant alors peu de place à une véritable expression des besoins qui risquerait de mettre en péril ce système si bien rôdé.

Cette vie en institution a été pointée du doigt, en 2017, par la rapporteure de l’ONU, Catalina Devandas-Aguilar, pour laquelle « un bon établissement n’existe pas ». Ainsi, elle vient interroger le modèle français sur les questions de liberté, du choix, de l’autonomie, de la capacité à s’autoreprésenter, de la vulnérabilité et de la bientraitance. Elle précise, dans son rapport, qu’en France, « l’accent est mis sur la prise en charge de l'incapacité alors que les efforts devraient converger vers une transformation de la société et du cadre de vie, de sorte que toutes bénéficient de services accessibles et inclusifs et d'un soutien de proximité ». Un « cloisonnement qui ne fait qu'entretenir une fausse image des personnes handicapées », à « prendre en charge plutôt que comme des sujets de droit. »

C’est dans ce contexte et en tant que directrices d’établissements médico-sociaux que nous nous sommes interrogées sur la façon de faire évoluer nos établissements pour donner, au sein de ce système, une véritable place d’acteur.trice de leur vie aux personnes que nous accompagnons.

Pour cela, un premier programme de formation basé sur les droits des personnes en situation de handicap au regard de la convention de l’ONU et sur l’Autodétermination a été mis en place entre 2018 et 2019. Des personnes concernées et des professionnels ont pu bénéficier de ce premier programme.

Les résultats sont venus confirmer notre hypothèse qu’augmenter l’Autodétermination des personnes leur permettrait d’agir sur leur environnement. Elles osent davantage s’exprimer et faire valoir leurs droits en termes d’inclusion et ainsi ont une réelle action sur le fonctionnement des établissements mais aussi sur notre société dans son ensemble.

Au sein d’une institution, il est important que cette démarche soit partagée et soutenue. Les personnes doivent être encouragées dans leurs initiatives. Comme dans un processus d’apprentissage et de développement, il est primordial d’accompagner les échecs et non de les éviter pour que ceux-ci deviennent expériences et permettent à la personne d’aller plus loin.

Si les établissements demeurent une solution pour bon nombre de personnes en situation de handicap dans la société telle que nous la connaissons aujourd’hui, il n’en demeure pas moins que les pratiques d’accompagnement et le regard que nous portons tous sur les personnes en situation de handicap doit évoluer.

Nous ne sommes qu’aux prémices d’un processus mené par les personnes elles-mêmes. Plus cette dynamique sera essaimée au sein des établissements médico-sociaux, dans les formations des futurs professionnels et dans d’autres secteurs et plus les personnes elles-mêmes auront les moyens d’agir sur le caractère inclusif de notre société.

Vivre ensemble et non plus l’un à côté de l’autre renforcera les relations humaines. Les différences des uns et des autres seront ainsi plus facilement acceptables, compréhensibles et supportables. C’est une fois que la personne en situation de handicap vit dans la cité et tient une réelle place de citoyen que l’adaptation prend tout son sens et qu’une collaboration entre tous peut prendre racine.

Patrick Lédée,
médecin à l'hôpital de Mulhouse

Autodétermination

Kenza SMATI,
Etudiante en pré-DAEU B à Reims
Ecrit le 29/03/2021

Je m’appelle Kenza SMATI, je suis étudiante en pré-DAEU B à Reims.

J'ai débuté cette formation en autodétermination en 2018. C’est à ce moment-là que j’ai pris connaissance de la convention de l’ONU et de son importance. J’ai appris aussi que, porteur d’un handicap ou non, nous avons les mêmes droits et devoirs que n’importe quel citoyen.

Pareillement, je prends connaissance de la discrimination, des injustices, des préjugés qui sont liés au handicap. Partout dans le monde. Hélas tout ceci reste encore d’actualité. La convention de l’ONU n’est pas prise totalement en compte encore aujourd’hui, elle est encore méconnue.

Durant toute cette année, j’ai beaucoup travaillé sur l'autodétermination avant de me faire ma propre définition. Pour moi, l'autodétermination c'est avant tout se connaître suffisamment, pour savoir ce qui bon pour soi et connaître ses valeurs. Être une personne d’abord. Connaître ses qualités et ses faiblesses, surtout croire en soi, en ses capacités. Ne pas avoir peur d'échouer. Se dire "d'accord je n'ai pas réussi de cette manière-là. Comment, quelles stratégies, quelles sont les ressources que je pourrais solliciter pour que je puisse enfin arriver à mon objectif" ?

C’est là que le mot autonomie vient. C’est quoi être autonome ? On a tendance à dire qu'être autonome c’est faire tout seul. On le dit souvent lorsqu'on réussit à accomplir une tâche seul avec ses propres mains. Alors que pas du tout, l’autonomie se manifeste de différentes façons. Je pense que savoir exprimer ses désirs, ses difficultés, peu importe comment, être acteur ou bien actrice de sa vie c’est cela la souveraineté de l’autonomie.

Recherche

Coups d’œil sur la recherche en éthique.

Pr Christophe De Champs de St Leger, Président du conseil d’orientation du site d’appui champardennais.

La méthodologie de la recherche en éthique, présentation de trois exemples

Christophe De Champs De St Leger

L’urgence de mener une réflexion éthique dans le domaine de la médecine est apparue après la deuxième guerre mondiale lors des révélations des expérimentations faites par les médecins nazis au procès de Nuremberg (1946). Celle-ci a été prolongée par les réactions de certains philosophes aux Etats-Unis face aux expérimentations menées sur l’homme. Ceci les a conduits à la création de centres de recherche sur les questions éthiques comme le Hasting Center, Garrison, NY (Daniel Callaghan, 1969) et Kennedy Institut of Ethics Georgetown University Washington DC (Andre Hellegers, 1971). Il n’est pas surprenant que ces initiatives soient venues de philosophes puisque par définition, l’éthique est une partie de la philosophie qui étudie les fondements de la morale.

Dans le domaine de la santé, les questions morales que pouvait rencontrer le praticien dans son exercice pour les soins courants trouvaient le plus souvent des réponses dans la réglementation en vigueur.

Cependant un certain nombre de situations et notamment les décès liés à la pratique d’interruptions de grossesses clandestines et certaines situations de souffrance n’étaient pas sans poser des questions éthiques au corps médical.

C’est dans le domaine de la recherche médicale que le questionnement éthique s’est imposé rapidement et de façon claire aboutissant à la création de ce qu’on appelle maintenant les Comités de Protection des Personnes. La mise en place des espaces de réflexion éthique et des Comités d’éthiques au sein des établissements hospitaliers a été plus longue.

Si les soignants et les chercheurs dans le domaine médical et biologique, conçoivent aisément ce que peut être l’éthique de la recherche, l’inverse est moins vrai. En effet, l’éthique étant en elle-même un questionnement, comment peut-on distinguer des travaux qui relèveraient de la recherche en éthique, d’une réflexion éthique courante réalisée par les différentes structures qui ont été mises en place pour cela.

Pour répondre à cette interrogation nous avons relevé quelques sujets de thèses déposées au cours de ces 10 dernières années et pouvant répondre au mot clé « recherche en éthique » pour s’intéresser à la méthodologie utilisée. Il est possible que des thèses de médecine n’aient pas été répertoriées avec ce mode de recherche.

Pour commencer nous nous intéresserons aux 3 thèses suivantes :

Auteur Année Titre Méthode Spécialité Sujet
Laurence Caeymaex 2011 La part des parents dans la décision en réanimation néonatale Exploration d’un univers méconnu Etude épidémiologique d'une cohorte de 217 familles. Entretien avec 164 familles néonatalogie Interruption de traitement en réanimation néonatale
Pierre Basset 2016 Aspects éthiques des situations de refus et arrêt de traitement Etude en 2 temps: (1) Recueil de 5 situations de refus connues des enquêteurs. Entretiens individuels avec chacun des protagonistes (patients soignants) pour en approfondir les raisons, le sens et le ressenti. (2) relecture et analyse avec l'espace de réflexion éthique. diverses consentement du patient
Aline Santin 2019 De l'urgence ou le mouvement de la rencontre Analyse de la rencontre médecin-patient aux urgences sous l'angle de l'anthropologie clinique, illustrée par 5 rencontres représentatives de différents types de questionnement. Bibliographie abondante. Urgences éthique de la relation médecin-malade aux urgences

L’objectif de la thèse de Laurence Caeymaex 2011 Université Paris XI, était d’analyser la notion de décision, à travers des entretiens avec des parents ayant été confrontés à des situations d’arrêt de traitement en réanimation néonatale. Cette étude a été réalisée selon les critères méthodologiques de recherche clinique avec sélection de 4 centres hospitaliers représentatifs de milieux de vie différents (urbain-rural, patients de niveaux socio-économiques différents). Une cohorte a été constituée par les parents dont l’enfant était décédé en réanimation néonatale ou à domicile après un séjour en réanimation néonatale. Leur inclusion a ensuite été déterminée par différents critères prenant en compte des conditions matérielles mais aussi psychologiques sur la capacité des parents à revenir sur cet épisode douloureux. Sur les 217 familles éligibles 164 ont répondu soit par téléphone soit en présentiel. L’analyse des données a été faite selon la méthode d’analyse du discours. Cette étude a été soutenue par la Fondation de France et un Programme Hospitalier de Recherche Clinique National. Les résultats sont donnés sous forme rédactionnelle, illustrés par des extraits d’entretien. La thèse montre que « le discours des parents, (…) peut aussi constituer un moyen didactique fort pour remettre en question des représentations un peu stéréotypées et plus généralement le modèle de la décision vécue en médecine ».

La thèse de Pierre Basset, 2016 Université Paris-Sud Ecole Doctorale n° 578 avait pour objectif « d’étudier ce qui amène une personne malade à formuler un refus de traitement, à partir d’une triple approche. Celle du patient et de ses proches, celle des professionnels confrontés à ce refus, celle d’un groupe de réflexion éthique, pluri professionnel, rassemblant des représentants des sciences humaines, ainsi que des « citoyens ordinaires » non professionnels de santé, apportant le regard de la cité ». Cette partie expérimentale est précédée d’une première partie sur la réflexion éthique, pour situer le contexte de l’étude. Cette étude n’est pas construite selon une méthode épidémiologique. Elle repose sur la sélection de 5 cas cliniques de situations de refus, pour des pathologies et des spécialités médicales différentes. Elle est constituée de 17 entretiens avec les différents protagonistes. Ces entretiens ont été soumis ensuite à des professionnels de santé et des non-professionnels extérieurs à l’équipe. Une deuxième enquête a été menée au cours des réunions du groupe de réflexion éthique visant à étudier la relation de soin confrontée au refus. Une des conclusions de la thèse est que « le refus de traitement n’est pas un refus de soin ». « Il montre aussi l’importance des méthodes de travail à mettre en place pour favoriser l’éthique du dialogue » et « la réflexion éthique, évitant l’arbitraire des convictions personnelles ».

La thèse d’Aline Santin, 2019 Université Paris-Sud Ecole Doctorale n° 578 débute par une situation d’incompréhension entre une jeune urgentiste et la fille d’un patient décédé, d’une insuffisance cardiaque terminale, à son admission dans un service d’urgences. La question de fond est le sens de la rencontre entre le médecin et le patient dans une situation d’urgence. Pour répondre à cette question, l’auteur présente sa thèse en 5 chapitres. Le premier décrit la médecine d’urgence, son contexte et ses tensions dans lesquels il y a peu de temps à consacrer à l’éthique, où « l’éthique (est) murmurée ». Le deuxième décrit des exemples observés aux urgences, où la rupture, par rapport à tous ses repères antérieurs, vécue par le patient, domine et altère la rencontre avec le médecin. « L’éthique (est) malmenée ». Dans le troisième chapitre l’auteur souligne que « l’urgence de la technique vient happer le temps ». L’importance accordée au tri et à l’orientation des patients prend le pas sur l’humain, au risque de desservir la personne malade. « L’éthique (est) empêchée ». Les deux derniers chapitres ouvrent une vision plus optimiste. L’exercice médical de l’urgentiste envahi par la technique et la course après le temps vient provoquer certains praticiens sur le sens à donner à leur métier. Ce questionnement aboutit à ce que l’auteur appelle « l’éthique dévoilée ». La quête de la réussite de l’acte médical par le praticien est sous-tendue par une espérance de rencontre réussie avec le patient. L’auteur en fait une « promesse » de réussite à la fois de la guérison mais aussi de la rencontre.

Pour conclure sur la méthodologie utilisée, ces thèses illustrent 3 approches différentes. La première applique strictement une méthode de recherche médicale. La dernière correspond à une réflexion personnelle approfondie, prenant en compte le contexte objectif de la situation des services d’urgence. La deuxième par son choix des cas cliniques présentés et la réflexion collégiale autour de ces situations offre une autre approche à mi-chemin entre les deux autres.

Entretien avec Pierre Basset
Ancien membre du Groupe de réflexion éthique et Praticien hospitalier, Douleur et Soins palliatifs, Centre Hospitalier Métropole Savoie

Thèse de doctorat en Éthique, soutenue le 26 janvier 2016 à l'Université Paris-Saclay (ComUE), sous la direction d’Emmanuel Hirsch et de Gilbert Bernard Zulian.
Aspects éthiques des situations de refus et arrêt de traitement

Entretien avec Aline Santin
Docteur en Médecine interne, Drépanocytose, Hôpital Tenon, HUEP

Thèse de doctorat en Éthique, soutenue le 15 mars 2019 à l'Université Paris-Saclay (ComUE), sous la direction de Emmanuel Hirsch et de Philippe Juvin.
De l'urgence ou le mouvement de la rencontre

presse

Les articles scientifiques ou grand public qui posent des questions éthiques

Pr Gérard Audibert, Directeur du site d’appui lorrain & Pr Michel Hasselmann Directeur du site d’appui alsacien.

Vaccins contre le SARS-Cov2 : Accélérer la recherche par les études de provocation humaines.

Michel Hasselmann

Dans le contexte de pandémie au SARS-Cov2 dont les conséquences sanitaires, sociales et économiques sont considérables, la piste la plus prometteuse pour l’enrayer est la vaccination de la population le plus largement possible dans des délais très courts afin d’obtenir à une immunité collective protectrice.

Mais le souci actuel vient, d’une part, de la pénurie relative de vaccins et, d’autre part, du fait que leurs effets secondaires et leur efficacité, notamment sur les variants du virus, sont encore imprécis. Pour acquérir ces connaissances, il faut se plier à la méthode validée des essais cliniques qui consistent à passer par les phases 1 à 3 avant que le laboratoire promoteur du candidat-vaccin puisse demander une autorisation de mise sur le marché (AMM). Peut alors débuter la phase 4 durant laquelle le médicament continue à faire l'objet d'un suivi strict à long terme pour identifier tout effet secondaire grave et/ou inattendu dû à son administration à grande échelle. Or, tout ceci dure de huit à dix ans ce qui est incompatible avec l’urgence d’une pandémie menaçante à très court terme.

Alors, comment faire pour accélérer le développement d'un vaccin sûr et efficace contre le SARS-Cov2 ? La seule possibilité actuelle est de raccourcir au maximum le temps des essais cliniques. Pour ce faire, il est proposé de réaliser des études de provocation humaines, c'est-à-dire d’infecter délibérément des volontaires sains avec le SARS-Cov2 après leur avoir administré le candidat-vaccin. En remplaçant les essais classiques de phase 2 et 3 il serait possible de réduire de plusieurs mois le processus d'homologation, ce qui permettrait de disposer plus rapidement de vaccins efficaces. Mais ces expériences comportent le risque évident que certains de ces volontaires développent une maladie grave ou meurent.

Se posent alors des questions éthiques majeures liées au caractère utilitariste de la méthode. Peut-on pour que de nombreuses vies puissent être sauvées, faire prendre des risques inconsidérés aux personnes entrant dans un essai clinique « raccourci » sur l’autel du bien commun ? Si oui, comment le faire au mieux.

L’annonce de ce type d’essai a été rapportée dans Nature news en octobre 2020 informant que le gouvernement britannique avait chargé une société privée d’organiser des essais de provocation humaine à partir de janvier 2021 dans un hôpital londonien sous réserve de l'approbation réglementaire et éthique ad oc.

Depuis, plusieurs articles abordent les questions éthiques soulevées par cette méthode de recherche clinique. Richards donne des directives éthiques pour guider l'infection délibérée de volontaires avec le SARS-Cov2 et considère les arguments pour et contre cette méthode. Kahn et al. considèrent que la gravité du COVID-19 et l'absence de remède ou de traitement efficace font qu'il n'est pas éthique, à l'heure actuelle, d’entreprendre des études de provocation humaines pour le développement d'un vaccin contre ce virus. Ces auteurs pensent que l'argument principal des promoteurs concernant l'accélération du développement d'un vaccin est erroné, et que le rapport risques-avantages de la méthode est à la fois trop incertain et probablement inacceptable. Ils pensent par ailleurs que les essais qui s’écartent des méthodes standards de la recherche clinique risquent d'exacerber la méfiance du public vis-à-vis de ces vaccins. Dans l'ensemble, ces auteurs estiment que les études de provocation humaines sur le SARS-CoV-2 sont injustifiées et contraires à l'éthique et qu’elles feraient plus de mal que de bien.

Dans un article de janvier 2021, Wibawa élargit la question aux essais cliniques en général sur les vaccins contre le SARS-Cov2 et rappelle qu’après y avoir participé, les sujets doivent avoir accès aux vaccins développés grâce à leur collaboration. Cela fait partie des avantages directs qu'ils doivent en retirer. Mais, disent les auteurs, bien que cette obligation soit mentionnée dans les directives éthiques internationales, tous les chercheurs ne la connaissent pas et ne sont pas conscients de cette obligation importante. Même dans l'urgence d'une pandémie, l'urgence de fournir un vaccin efficace doit être équilibrée avec l'exigence de l'éthique de la recherche qui doit être maintenue. Dans tous les cas, la sécurité et le bien-être des sujets qui se soumettent à la recherche doivent être assurés.

Eyal et al. reconnaissent que le fait d’exposer des volontaires au virus vivant SARS-Cov2 risque de provoquer une maladie grave, voire la mort. Ils soutiennent néanmoins qu’en accélérant l'évaluation des vaccins, il est possible de réduire la mortalité et la morbidité mondiale liée à ce virus. Ils pensent que le risque net pourrait être acceptable si les participants volontaires et informés sont de jeunes adultes en bonne santé, s’ils présentent un risque relativement faible de maladie grave à la suite d'une infection naturelle, s'ils sont exposés à un risque initial élevé d'infection naturelle et s’ils peuvent bénéficier durant l’essai d'une surveillance fréquente avec accès aux meilleurs soins disponibles en cas de toute infection.

Calina et al. considèrent que l'obtention plus rapide de vaccins par le biais d'études d'infection délibérée de personnes en bonne santé présente plus d'avantages que de risques. Ces auteurs rappellent que cette méthode a déjà permis l'obtention d'autres vaccins lors de pandémies historiques telles que la variole, la grippe, le paludisme, la fièvre typhoïde, la dengue et le Zika.

On voit ainsi que les questions éthiques entourant les études de provocation humaine dans le cadre de la Covid 19 restent largement ouvertes. Ceci étant, si des vaccins ont été produits et commercialisés avec une incroyable rapidité, les études basées sur la technique de provocation humaine ne sont certainement pas étrangères à cet incontestable succès.

Alors faut-il plébisciter l’utilitarisme comme valeur éthique supérieure ? A chacun de se faire son idée.

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Des liens vers des émissions TV, radios, podcast, webinaires, conférences... intéressants du point de vue éthique.

Pr Anne Danion, Présidente du conseil d’orientation du site d’appui alsacien & Laure Pesch, coordinatrice du site d’appui alsacien.

Podcasts

En santé mentale, les risques majeurs c’est la précarité sociale et l’isolement social

Un podcast de France Inter. Angèle Consoli, pédopsychiatre à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, membre du Conseil scientifique, répond aux questions de Léa Salamé.

Ecouter le podcast sur le site de france inter
Replay

Vaccination anti covid19 – Données actualisées sous un regard éthique-Hôpitaux universitaires de Strasbourg

Un certain nombre de professionnels de la santé et du médico-social, mais aussi un grand nombre de citoyens étaient hésitants, en début d’année 2021, voire opposés à la vaccination anti- Covid 19, avec des arguments plus ou moins rationnels. Un revirement notable, avec l’espoir de voir la fin de cette crise sanitaire, s’est fait jour avec le début de la mise en œuvre de la vaccination. Mais une campagne de vaccination difficile à mettre en place, un approvisionnement en vaccin ne répondant pas aux attentes, des inquiétudes face à certaines formes de vaccin et l’apparition de variants remettent en cause cet élan. Aussi une mise au point actualisée sur la vaccination contre anti-COVID 19 paraissait essentielle, en reprenant les données scientifiques et les stratégies vaccinales tout en les articulant aux problématiques éthiques et médicolégales mises en jeu. En effet, plusieurs des principes éthiques fondamentaux que sont l’autonomie, le consentement mais aussi la bienveillance et l’équité sont particulièrement invités dans les débats sur la vaccination anti-COVID sans que cela soit forcément explicité. Il était donc essentiel que le CHU de Strasbourg et sa Cellule de soutienne éthique Covid 19 (COV’Ethique) soutiennent et soient les porteurs d’une telle table ronde qui s’est tenue en février 2021.

Voir le replay sur le site d'UNISTRA
Replay

Société de Psychiatrie de l’EST - « Covid-19 et santé mentale » - 19 mars 2021

Le colloque annuel de la Société de Psychiatrie de l’Est qui s’est tenu le 19 mars dernier a eu pour sujet « Covid-19 et santé psychiatrique » abordant différentes problématiques, allant d’un regard historique sur les épidémies jusqu’aux effets du confinement sur les enfants et les adolescents en passant par la réorganisation de deux hôpitaux alsaciens gravement touchés, les problématiques éthiques liées aux bouleversements hospitaliers et les risques liés à la maladie pour les personnes atteintes de troubles mentaux.

Voir le replay sur le site psyest.fr

culture

Tour d’horizon d’œuvres qui nous permettent d’aborder des questionnements éthiques de manière singulière !

Hélène Gebel, coordinatrice régionale de l’EREGE.

Ethiques en séries

Quand les séries abordent des questionnements éthiques.

Bref aperçu avec This is us (la GPA), The Good Doctor (les décisions d’arrêt des traitements), Mental (les troubles psychiatriques des adolescents) et HPI (le haut potentiel).

Lectures

Algues Vertes

Inès Léraud, Scénariste, Pierre Van Hove, Illustrateur, Mathilda, Coloriste, Delcourt

Pas moins de 3 hommes et 40 animaux ont été retrouvés morts sur les plages bretonnes. L'identité du tueur est un secret de polichinelle : les algues vertes. Un demi-siècle de fabrique du silence raconté dans une enquête fleuve. Des échantillons qui disparaissent dans les laboratoires, des corps enterrés avant d'être autopsiés, des jeux d'influence, des pressions et un silence de plomb. L'intrigue a pour décor le littoral breton et elle se joue depuis des dizaines d'années. Inès Léraud et Pierre Van Hove proposent une enquête sans précédent, faisant intervenir lanceurs d'alerte, scientifiques, agriculteurs et politiques.

Algues Vertes
Lectures

La voyageuse de nuit

Laure Adler, Grasset

« C'est un carnet de voyage au pays que nous irons tous habiter un jour. C'est un récit composé de choses vues sur la place des villages, dans la rue ou dans les cafés. C’est une enquête tissée de rencontres avec des gens connus mais aussi des inconnus. C’est surtout une drôle d’expérience vécue pendant quatre ans de recherche et d’écriture, dans ce pays qu’on ne sait comment nommer : la vieillesse, l’âge ?

Les mots se dérobent, la manière de le qualifier aussi. Aurait-on honte dans notre société de prendre de l’âge ? Il semble que oui. On nous appelait autrefois les vieux, maintenant les seniors. Seniors pas seigneurs. Et on nous craint – nous aurions paraît-il beaucoup de pouvoir d’achat - en même temps qu’on nous invisibilise. Alors que faire ? Nous mettre aux abris ? Sûrement pas ! Mais tenter de faire comprendre aux autres que vivre dans cet étrange pays peut être source de bonheur…

Plus de cinquante après l’ouvrage magistral de Simone de Beauvoir sur la vieillesse, je tente de comprendre et de faire éprouver ce qu’est cette chose étrange, étrange pour soi-même et pour les autres, et qui est l’essence même de notre finitude.

« Tu as quel âge ? » Seuls les enfants osent vous poser aujourd’hui ce genre de questions, tant le sujet est devenu obscène. A contrario, j’essaie de montrer que la sensation de l’âge, l’expérience de l’âge peuvent nous conduire à une certaine intensité d’existence. Attention, ce livre n’est en aucun cas un guide pour bien vieillir, mais la description subjective de ce que veut dire vieillir, ainsi qu’un cri de colère contre ce que la société fait subir aux vieux. La vieillesse demeure un impensé. Simone de Beauvoir avait raison : c’est une question de civilisation. Continuons le combat ! »

La voyageuse de nuit
Lectures

Moments extraordinaires sous faux applaudissements

GIPI

Comme tous les artistes de one-man-show, son métier est de faire rire le public. Mais actuellement, entre ses soirées de représentations, il va au chevet de sa vieille maman à l’hôpital. Celle-ci reste désormais immobile, somnolente, elle peut mourir à chaque instant. Il ne sait même pas si elle l’entend lorsqu’il lui parle, car elle ne lui répond pas. Une infirmière lui donne l’astuce : il faut parler très fort car elle est sourde. Il donne régulièrement des nouvelles à sa compagne, par téléphone interposé. Il lui raconte les rêves étranges qu’il faits et qui l’interrogent sur l’existence. Il lui parle de ce petit garçon, lui-même jeune, insouciant, optimiste et donneur de leçons, qu’il revoit vivre jadis dans une toute autre relation avec sa mère. Il ne dit pas que ce petit garçon l’accompagne désormais en permanence, pour lui renvoyer une image perdue de lui-même. Entre autre tourment, il y a celui de sa stérilité, qu’il a récemment apprise. Ça n’est pas très grave, il y a déjà tant de gosses dans le monde. Et pourtant, l’homme primitif qui est tapi au fond de lui, cet homme qui est à son origine et qui a réussi à se produire depuis la nuit des temps, pousse un cri de terreur. Et puis il y a ces astronautes, en perdition à la surface d'une planète hostile...

Moments extraordinaires sous faux applaudissements
Lectures

Nellie Bly

Virginie Ollagnier-Jouvray, Scénariste, Carole Maurel, Dessinateur, Carole Maurel, Glénat

« Nous étouffons parmi des gens qui pensent avoir absolument raison », disait Albert Camus, et nous sommes nombreux à ressentir la même chose aujourd’hui, tant l’air devient proprement irrespirable. Les réseaux sociaux sont un théâtre d’ombres où le débat est souvent remplacé par l’invective : chacun, craignant d’y rencontrer un contradicteur, préfère traquer cent ennemis. Au-delà même de Twitter ou de Facebook, le champ intellectuel et politique se confond avec un champ de bataille où tous les coups sont permis. Partout de féroces prêcheurs préfèrent attiser les haines plutôt qu’éclairer les esprits.

Avec ce livre, Jean Birnbaum veut apporter du réconfort à toutes les femmes, tous les hommes qui refusent la « brutalisation » de notre débat public et qui veulent préserver l’espace d’une discussion aussi franche qu’argumentée. Pour cela, il relit les textes de quelques intellectuels et écrivains qui ne se sont jamais contentés d’opposer l’idéologie à l’idéologie, les slogans aux slogans. Renouer avec Albert Camus, George Orwell, Hannah Arendt, Raymond Aron, Georges Bernanos, Germaine Tillion ou encore Roland Barthes, ce n’est pas seulement trouver refuge auprès de figures aimées, qui permettent de tenir bon, de se tenir bien. C’est surtout retrouver l’espoir et la capacité de proclamer ceci : dans le brouhaha des évidences, il n’y a pas plus radical que la nuance.

Jean Birnbaum dirige Le Monde des livres. Il est l’auteur de plusieurs essais, et notamment d’Un silence religieux. La gauche face au djihadisme (2016, prix Aujourd’hui) et La Religion des faibles. Ce que le djihadisme dit de nous (2018, prix Montaigne).

Nellie Bly
Lectures

Le courage de la nuance

Jean Birnbaum, Seuil

Pas moins de 3 hommes et 40 animaux ont été retrouvés morts sur les plages bretonnes. L'identité du tueur est un secret de polichinelle : les Le courage de la nuance. Un demi-siècle de fabrique du silence raconté dans une enquête fleuve. Des échantillons qui disparaissent dans les laboratoires, des corps enterrés avant d'être autopsiés, des jeux d'influence, des pressions et un silence de plomb. L'intrigue a pour décor le littoral breton et elle se joue depuis des dizaines d'années. Inès Léraud et Pierre Van Hove proposent une enquête sans précédent, faisant intervenir lanceurs d'alerte, scientifiques, agriculteurs et politiques.

Algues Vertes
Lectures

Sœur sans bruit, grandir avec un frère différent

Rouergue, Coll. La Brune

Léon et Paulin sont nés à six mois et demi. Paulin, le second, a fait une hémorragie cérébrale. Il est resté polyhandicapé, un état qui associe déficit mental et infirmité motrice cérébrale. À travers les questionnements, les doutes, les démarches sans fin, se construit en mots justes et forts un récit familial, comme on partage un secret. Celui de l’affection et de la charge. Celui des sentiments et des ressentiments. En creux, Anne-Laure Chanel, la sœur aînée, celle qui adolescente poussait des cris inaudibles, interroge sa propre place dans cette fratrie pas comme les autres.

Sœur sans bruit, grandir avec un frère différent
Lectures

Le sens des limites

Monique Atlan et Roger-Pol Droit, Les Editions de l’Observatoire, Col. Essais

De tous côtés, nous vivons une crise des limites, celle des ressources énergétiques, des moyens d’imaginer l’avenir, des possibilités d’action. Et si, pour en sortir, l’idée même de limite était à repenser ?

Abolir ou renforcer les frontières, poursuivre une expansion sans fin ou imposer de nouvelles normes écologiques, respecter ou transgresser la distanciation physique liée à la Covid, instaurer ou non une limitation de vitesse à 80 km/h… partout les limites font débat. Entre ceux qui souhaitent les effacer et ceux qui veulent les renforcer, l’impasse est totale. Car tous s’affrontent au sujet des limites, pensées comme carcans par les uns, comme protections étanches par les autres – sans s’interroger sur le sens de la notion, tenu pour évident. Il n’en est rien.

Monique Atlan et Roger-Pol Droit revisitent cette idée, ses définitions et ses principales représentations au long de l’histoire occidentale. À travers une série de variations, ils montrent combien la limite est décisive, positive, indispensable à l’organisation de la pensée, des sociétés et de la vie.

Une promenade philosophique qui suggère une salutaire politique des limites.

Le sens des limites

événements

Retour sur les manifestations réalisées ou soutenues par L'EREGE

Laure Pesch, coordinatrice du site d’appui alsacien.

Rencontres

« Soigner et prendre soin : questions éthiques en période de pandémie » Rencontres du 9 mars

Dans le cadre de sa mission d’Observatoire des pratiques éthiques, le site d’appui alsacien de l’Erege a souhaité cette année donner une place centrale aux témoignages d’acteurs du terrain, pour comprendre comment les questions éthiques se sont posées dans les situations de soin en cette période inédite de pandémie.

Dans nos sociétés contemporaines où la santé est devenue un droit individuel et une préoccupation collective, la pandémie a surgi confrontant tous les acteurs du soin à des contraintes multiples, des situations inédites, qui ont conduit à des tensions éthiques dans les pratiques, mais aussi dans l’impossibilité même de ces pratiques (lors du confinement strict par exemple). Et l’éthique qui se pense d’ordinaire au long cours, s’est imposée dans l’urgence.
Les interventions du 9 mars ont permis de :

  • poser le cadre juridique et réglementaire imposé à toute la population dès le 13 mars 2020
  • considérer le critère d’équité dans l’accès aux soins en période de pandémie
  • comprendre le rôle des instances éthiques
  • témoigner du vécu d’acteurs de terrain
Rencontres annuelles d'éthique-Synthèse et vidéo
Festival

Curieux Festival Curieuses rencontres

Organisé par les compagnies Esprit joueur et Va savoir le Curieux Festival permet la rencontre et provoque le dialogue entre artistes et scientifiques.
Ainsi le clown Nino fort de ses questions sur la vaccination a rencontré Monsieur Christophe Hommel Médecin responsable du Centre de vaccinations internationales et du Centre antirabique au CHU de Strasbourg.
Le dialogue aborde simplement la question de l’utilité de la vaccination, l’obligation vaccinale, la solidarité, l’engorgement des hôpitaux…

Curieuse rencontre-La vaccination-Je me protège, tu me protèges
Rencontres

Rencontres Santé-Société Les Jeunes à l'épreuve d'une pandémie

Marc MICHEL, philosophe, vice-président d’Euro cos Humanisme et santé.

Avec le soutien de l’EREGE, Euro cos Humanisme et santé a tenu deux sessions, la première à l’Université de Strasbourg en octobre 2020 et la seconde pour l’Université de Bourgogne, en visioconférence, en raison des mesures de sécurité sanitaire, en février 2021. Le choix de ce thème s’était imposé comme une évidence tant les enfants et les jeunes apparaissaient particulièrement impactés par le confinement décidé lors de la première vague de la pandémie. Depuis, et malgré les allègements consentis, ce choix s’est avéré plus que pertinent. Non pas que les enfants et les jeunes étaient et restent la seule partie vulnérable de la population, - comment en effet pourrait-on oublier le sort des personnes âgées des EPHAD ou demeurées à domicile – mais parce qu’ils constituent le futur de notre société.

Le débat public n’a cessé du reste de se radicaliser. N’a-t-on pas accusé les jeunes d’insouciance et d’irresponsabilité lors de la tenue de rencontres festives interdites ? En outre, l’apparition des variants du covid 19, à commencer par celui apparu au Royaume Uni, a provoqué une accélération de la pandémie de même qu’une contagiosité accrue notamment chez les plus jeunes générations. Enfin, bien au-delà de cette profonde crise sanitaire, c’est le fonctionnement global de notre société qui se trouve atteint de plein fouet, en particulier l’économie, la culture et les échanges nationaux et internationaux.

Le lecteur de cette News Letter pourra prendre connaissance des riches apports de la première session grâce à la publication de ses Actes Les enfants et les jeunes à l’épreuve d’une pandémie, ouvrage édité par l’Université de Strasbourg en février 2021. Quant à la session tenue à l’Université de Bourgogne, en visioconférence, on pourra en découvrir les communications grâce au lien internet établi par le site http://eurocos.u-strasbg.fr.Je me propose ici d’en noter, de façon très résumée, les contenus les plus remarquables.

Comme l’ont démontré les enquêtes conduites en France et les pays limitrophes (Italie, Suisse, Allemagne, Belgique), les enfants sont très sévèrement perturbés par la fermeture de l’école et touchés directement par les conditions et le niveau de vie de leur famille. Aussi devons-nous reconnaître la très grande diversité de leurs situations ; pour tous cependant, l’école représente l’assurance d’un lien essentiel avec leurs enseignants et leurs camarades et, pour les moins fortunés d’entre eux, la garantie, grâce aux cantines scolaires, d’une alimentation saine et régulière. Pour cette raison, les pédiatres se sont toujours élevés contre la fermeture des écoles. A titre d’exemple, l’expérimentation de dialogue entre l’union des pédiatres du Bas-Rhin et des chefs d’établissements est singulièrement révélatrice. La santé de l’enfant se joue au sein d’une complexité de relations et d’environnements. Cette règle est, semble-t-il, encore plus forte chez les adolescents pour qui le confinement ou les restrictions du couvre-feu viennent contrecarrer directement leur soif de relations avec leurs pairs et leur recherche légitime d’autonomie. Enfin, les jeunes étudiants ou apprentis voient leur parcours de formation et d’insertion professionnelle rendu complètement précaire sinon impossible. Comment peuvent-ils se projeter dans l’avenir et ainsi trouver sens à un présent totalement perturbé ? La mise à mal du programme Erasmus par l’impossibilité des déplacements et des séjours à l’étranger ne fait qu’ajouter à la pesanteur d’une situation de difficultés sans nom. Qui n’eut jamais pensé voir des étudiants faire la queue pour chercher un panier repas ? Ce tableau serait bien sombre si, dans le même temps, l’on ignorait l’éclosion de nombreuses formes de bénévolat tant à l’égard de leurs camarades démunis qu’à celui de personnes vulnérables. Par sa dureté de ses contraintes, la pandémie ne saurait faire oublier le développement de solidarités nouvelles.

Les enfants et les jeunes, cependant, ne constituent pas une île ; ils témoignent, avec sensibilité, de la société globale qui est la nôtre, une société qui révèle ses faiblesses d’organisation par insuffisance de la prévention mais en même temps les ressorts inattendus de leur dépassement. Ainsi en est-il du rapport au temps qui est le lieu même de la continuité de tout récit. Quand la perspective du futur paraît se dérober, il devient impossible de maintenir l’espoir d’une continuité rassurante. La société frappée par le confinement et les contraintes imposées par les nécessités de la sécurité sanitaire est la société au récit interrompu. C’est ce qu’a bien montré l’enquête CoviPrev de Santé Publique France : 31% de la population globale souffre d’états anxieux et ce phénomène touche directement la tranche des 18-24 ans. La question de la santé mentale, sous-estimée au départ, apparaît alors comme une épidémie dans la pandémie ; elle montre que, quelle que soit les tranches d’âge, notre société réagit de façon globale. Pour cette raison, les observations comme leur analyse nous conduisent à reconnaître l’acuité des relations intergénérationnelles et la nécessité absolue de garantir aujourd’hui et demain les liens d’une solidarité renouvelée.

En effet, la pandémie, par sa diffusion exponentielle, contraint chacun, quels que soient son niveau de vie, son statut social, à l’expérience de l’interdépendance entre tous, depuis le groupe familial jusqu’à l’école ou l’université, l’entreprise, les déplacements et les rares lieux de loisirs ou de culture. L’universalité des gestes barrière et la campagne de vaccination soulignent à n’en pas douter l’incontournable condition d’une parade collective. Ainsi, les historiens de demain verront-ils peut-être en cette crise sanitaire, par-delà ses multiples contraintes, comme ses frustrations profondes, le ressort inattendu d’une résilience présumée improbable.

Euro cos Humanisme et santé a, par deux sessions distantes de quelques mois, cherché à comprendre le monde tel qu’il change, sans prétendre atteindre la vérité. Personne, en effet, ne saurait en l’occurrence prétendre détenir le dernier mot mais l’essentiel, plus fort que l’effondrement de nos savoirs et de nos certitudes, le temps ne serait-il pas venu, face au deuil d’un récit collectif, de retrouver l’ouverture d’une parole partagée, promesse d’un nouveau récit ?

Les jeunes à l'épreuve d'une pandémie-Rencontres santé société - EuroCos et Humanisme
Webinaire

Cycle de webconferences Les Fake News en sante organisé par le site d’appui champardennais

Trois conférences consacrées à l’informations dans le domaine de la santé, leur impact sur la prise de décision, les effets du langage.

Les fausses et les mauvaises informations en santé sont légion dans la presse grand public et les réseaux sociaux. Elles ont connu une visibilité accélérée dès le début de la pandémie, comme le montre dans la 1ère conférence Alain LEON – PU-PH d’Anesthésie-Réanimation Directeur de l’EREGE et du site d’appui Champagne-Ardenne –. Mauvaise information, fausse information, rumeur, information intentionnellement manipulée, complotisme, autant de déformations des données scientifiques et médicales qui posent une question d’éthique.

La recherche scientifique évolue dans le temps long. L’irruption d’une maladie inédite, d’une pandémie assortie de peurs, a malmené l’information qui est devenue la préoccupation quotidienne majeure des citoyens. On peut interroger la réponse scientifique et médiatique qui s’est parfois départie des principes de précaution, du doute, du questionnement, de la vérification qui sont à la base de la démarche de la recherche en santé.

Des informations à la mésinformation-une question d'éthique

Emmanuel KOERNER, Philosophe et psychanalyste a, dans une deuxième conférence, montré le processus de fabrication du discours en santé notamment entre un patient et un praticien. L’information est une action intentionnelle, d’un émetteur vers un récepteur, porteuse d’un contenu et d’un sens. L’information en santé a toujours une conséquence sur la vie ou la survie du patient. Le sens qui lui sera donnée est le fait de l’intention du praticien, mais aussi de sa réception par le patient. Lorsqu’il y a un flot de discours en santé il devient difficile de laisser sa place à l’incertitude, et à faire émerger la vérité. Ainsi Emmanuel KOERNER montre pourquoi l’information qui s’échange entre le patient et le praticien relève d’un discours intime, d’une relation personnelle.

Information médicale et effet du langage

Lors de la 3ème conférence, Béatrice DELEPINE, Biologiste de la Reproduction au CECOS de Reims, confronte les conditions réelles de la PMA en France avec les informations, fausses, erronées, intentionnellement orientées, publiées dans des journaux ou des sites internet. Certaines de ces informations atteignent des femmes (principalement) en dehors du discours patient-praticien, sans l’intentionnalité médicale nécessaire à la sécurité, en dehors de toute éthique du soin. Béatrice DELEPINE s’interroge donc sur l’ensemble des questions éthiques soulevées par ces offres souvent tarifées de pratiques de procréation.

Agenda

Des annonces sur les formations et évènements scientifiques ou culturels à venir.

Hélène Gebel, coordinatrice régionale de l'EREGE.

Ecole d'automne

École d'Automne "Éthique et Littérature" du 30 septembre au 2 octobre 2021

Il s'agira d'offrir, en douze heures, une formation de haut niveau aux étudiants de master, de doctorat et aux chercheurs qui souhaitent approfondir leurs connaissances des relations entre éthique et littérature. Deux thématiques de LETHICA ("faire cas" et "révolutions morales") seront abordées dans une perspective interdisciplinaire.

A quoi sert de raconter des histoires ? Sur les relations entre éthique et littérature :

La lecture nous rend-elle heureux ? En quoi les histoires aident le diagnostic médical et orientent la construction de véhicules automatiques ? Pourquoi interdisait-on aux femmes de lire les romans ? L’étude des relations entre éthique et littérature permettra de répondre à ces questions. Une première session sera consacrée au "cas": des spécialistes internationaux viendront expliquer pourquoi le récit bref d’une situation particulière (un cas) est un outil essentiel pour la philosophie, la sociologie, la psychologie et de la médecine. Un atelier pratique nous initiera à penser "par cas". Il s’agira aussi de comprendre le « bonheur » que l’on peut tirer de la lecture, à partir des méthodes mises au point par l’économie du bien-être. Une deuxième session sera consacrée à l’évolution des relations entre éthique et littérature, de l’Antiquité aux temps modernes.

Les déjeuners et les pauses café (prises en charge par l’école) permettront de prolonger le dialogue dans un esprit convivial.

Dates et lieux :

  • Jeudi 30 sept : conférence inaugurale à 17h suivie d'un cocktail
  • Vendredi 1 oct : 8h30 - 17h30
  • Samedi 2 oct : 9h - 13h

total heures : 12h

Université de Strasbourg - Campus de l'Esplanade (les salles seront précisées ultérieurement)

Inscriptions :

  • pour les doctorants : inscription uniquement sur AMETHIS
    Validation → attestation de présence (présence recommandé à l'ensemble de la formation - 12h - mais possibilité également de valider les heures par session : 1h-7h-4h)
  • pour les étudiants du M2 du master LFGC (dans le cadre de l'UE5) et M2 du master Éthique : inscription administrative via votre scolarité
    validation → une présentation écrite de 8-10 pages à concorder avec Enrica Zanin et/ou Jean-Christophe Weber
  • pour toute autre inscription : étudiants de master ("stage en laboratoire"), autres étudiants, chercheurs, autres publics : Inscriptions : par mail imahoudeau[at]gmail.com

Places limitées - date limite d'inscription : 20 septembre 2021

Rencontres

Rencontres Santé Société Georges Canguilhem de Strasbourg

Trois demies journées au Palais universitaire de Strasbourg les 8 et 9 octobre 2021 sur le thème suivant « Certitude et incertitude en santé - Réapprendre le risque! »

Vendredi matin, nous irons aux sources de l’incertitude, avec notamment Didier Le Prado, Avocat à la Cour de Cassation et au Conseil d’Etat, et Éric Fourneret, Docteur en philosophie, Braintech Lab, Université de Grenoble.

Vendredi après-midi, nous réfléchirons à la phénoménologie de l’incertitude en santé avec entre autres Jean-Christophe Weber, Professeur de médecine interne Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, et Henri Bergeron, directeur de recherche au CNRS, coordinateur scientifique de la chaire santé de Sciences Po Paris.

Samedi matin, enfin, nous nous demanderons s’il est encore possible d’imaginer nos lendemains. Alain Leon, Directeur de l’Espace de réflexion éthique du Grand Est, et Nicoletta Diaso, Professeure de sociologie UMR DyamE IUF, Université de Strasbourg, s’interrogeront avec nous.

Inscriptions en ligne. Gratuite pour les étudiants. Reconnue au titre de la formation continue.